L’âge d’or de la médecine islamique

Written by Quaerere FMPC

November 18, 2022

Si la période médiévale en Europe est connotée à son obscurantisme, d’innombrables prouesses et découvertes ont marqué l’empire musulman, s’étalant du  VIIeme au XIVeme siècle. Les érudits musulmans se sont démarqués dans différentes disciplines, notamment les sciences de la santé.Preuve de réceptivité à l’héritage pré-islamique , le mouvement de traduction des grands traités de médecine d’Hippocrate, Galéen et Dioscoride, notamment à Bayt-al Hikma (maison de la sagesse),centre bibliothécaire et intellectuel majeur situé à Bagdad, a permis non seulement l’éclosion d’une pensée critique et le développement de nouvelles connaissances mais aussi la perpétuité de la science. C’est d’ailleurs durant cette aire qu’Ali Attabari a produit la première encyclopédie médicale “FirdaousAl-Hikma” (paradis de la sagesse), où encore qu’Arrazi (Rhazès), son élève, a rédigé “Al-hawi fi tibb” (Le contenant), considéré jusqu’au XVII èmesiècle comme l’ouvrage médical le plus complet ayant existé. “Al-Canoun”(le Canon) d’Ibn Sina (Avicenne), quant à lui, est longtemps resté l’ouvrage de référence dans les universités Européennes.

-Dans le 1er volume d’Al-Hawi, consacré à la neurologie et la psychiatrie, Arrazi a établi le lien entre les maladies mentales et les dysfonctionnements du système nerveux, alors qu’elles étaient rattachées aux facteurs surnaturels comme la sorcellerie, les mauvais esprits et les phases de la lune. Il a abordé entre autres la paralysie faciale, la migraine, l’épilepsie, les troubles du sommeil, le trouble obsessionnel compulsif, l’hallucination et la mélancolie. Il a aussi utilisé la psychothérapie cognitive pour remédier à certains troubles psychiatriques.

-Ibn Al Haytam, pionnier de l’optique moderne, a adopté une méthode scientifique pour prouver la théorie de l’intromission et ainsi expliquer les principes de la vision binoculaire.-La circulation pulmonaire a été décrite pour la 1ère fois par Ibn Al-Nafiss, réfutant la croyance répandue du passage du sang du ventricule droit au ventricule gauche par des voies septales invisibles.-Al-Farabi a étudié les bases physiques du son, contribuant ainsi à la compréhension de sa propagation et de la physiologie de l’audition.Azahrawi (Abulcasis) a inventé des centaines d’instruments chirurgicaux dont le bistouri, le speculum vaginal et les premiers forceps, tous illustrés dans son traité de 30 volumes “Kitab-Attasrif” (Le pratique). Il y a aussi méticuleusement regroupé la physiopathologie, les signes cliniques et les étiologies de nombreuses affections  obstetrico-gynécologiques et neurochirurgicales, et a même décrit l’alcool comme antiseptique pour stériliser le matériel chirurgical. Il a également plaidé en faveur de l’autopsie, considérée jusqu’alors comme mutilation de la création divine.

-Les premières expérimentations animales sont attribuées à Ibn-Zohr (Avenzoar), qui a décrit la trachéotomie par observation expérimentale sur des chèvres. Précurseur de la parasitologie, il a mis en évidence le « souab », agent de la Gale.

-C’est aussi au moyen âge islamique que la pharmacie s’est individualisée comme discipline à part entière.Al-Kindi, mathématicien et pharmacien des plus influents de son époque, a établi une formule permettant de calculer la concentration des principes actifs en fonction des effets thérapeutiques recherchés.Nous devons à Jabir ibn Hayane (Geber), père de la chimie, la création de l’alambic, appareil utilisé dans la distillation, ou encore la découverte de l’acide chlorhydrique.  Attamimi s’est démarqué par l’étude des propriétés des plantes médicinales et l’élaboration d’antidotesdes poisons.De plus, les pharmaciens de cette époque ont enrichi la galénique médicamenteuse en créant les sirops à base de sucre.

-L’organisation du système de soin sous forme de « Bimaristans », hôpitaux charitables ouverts à tous, a su allier prise en charge des malades et enseignement clinique au lit des patients. Séparés en fonctions de leur sexe et leur maladie afin d’éviter les contaminations, les malades pouvaient profiter de la bibliothèque et des jardins mis à leur disposition. Il faut citer que les médecins musulmans étaient les premiers à établir un dossier médical pour les malades, et que l’exercice de la médecine nécessitait « Al-Ijaza », diplôme attribué par un maître.

Éthique rationnelle et bienfaisance étant principes de la pratique médicale, le patient bénéficiait d’une information claire et loyale sur son état de santé, et avait le choix d’accepter ou de refuser les démarches thérapeutiques proposées par son médecin. Arrazi a incité les médecins à mettre à jour perpétuellement leurs connaissances médicales et de s’appliquer dans leur pratique afin de prodiguer les meilleurs soins à leurs patients.

Finalement, les savants musulmans ont amplement enrichi l’héritage scientifique et influencé les sciences de la santé. Constantin l’africain, en inaugurant la première vague de traduction d’ouvrages de la médecine musulmane, a participé à la diffusion de ces connaissances en Europe, constituant ainsi un tournant capital dans l’histoire de la médecine occidentale.

 

La destruction de Bayt Al Hikma en 1258 lors de l’invasion mongole, réduisant en cendre l’œuvre et le rendement scientifique de siècles de dur labeur, signe une grande perte pour l’humanité et le début du déclin de l’âge d’or culturel islamique.

I. Belekbier
Z. Bakka

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